· 

Paradise lost

samedi 09/11/2019 – Flagey

 

Brussels Philharmonic avec Jun Märkl
Akiko Suwanai, violon

 

 

Le programme s’ouvre sur une œuvre extrêmement romantique : Siegfried-Idyll de Wagner, musique destinée à constituer une surprise pour Cosima Lizt à l’occasion de son anniversaire, le 25 décembre 1870.

 

J’ai fermé les yeux en l’écoutant et imaginé la scène : la maison de Tribschen envahie en silence par les amis musiciens et cette musique jouée dans l’escalier menant à la chambre de Cosima ; l’émotion était au rendez-vous comme elle devait l’être en ce matin de Noël et d’anniversaire 1870.

 

Vient ensuite Nosthalgia du compositeur japonais Toru Takemitsu, composée en 1987 en hommage au réalisateur Andrei Tarkovsky et à l’intention de monsieur Yehudi Menuhin. Je n’ai pas aisément apprécié cette œuvre, mon attention s’est parfois égarée.

 

La gestuelle de monsieur Jun Märkl et la grâce de madame Akiko Suwanai ont constitués de précieux guides pour me laisser emporter.

 

Une maîtrise du son, une gestuelle qui semble chorégraphiée, il n’est point de doute cette violoniste nous communique l’intensité de son chant intérieur : sa gestuelle m’a hypnotisée -Akiko Suwanai danse en jouant- permettant ainsi à la musique de s’instiller jusqu’au frisson.

 

 

Enfant, les oiseaux me faisaient rêver, je pouvais passer des heures à regarder mésanges et merles dans le jardin. Que dire alors du chant de l’alouette, accompagnant sa lente ascension vers l’azur avant de se laisser choir, une observation maintes fois renouvelée mais toujours fascinante à mes yeux.

 

Elle est hélas en voie de disparition dans nos campagnes ; ce propos ajoute une note de nostalgie supplémentaire à un programme déjà riche en émotions.

 

The lark ascending, partition écrite par monsieur Vaughan Williams à l’aube de la première guerre mondiale m’a plongée dans ces souvenirs d’enfance, cela commence dans le grave et monte jusqu’à une légèreté aérienne, nous sommes transportés dans un paysage bucolique sous un ciel pas totalement bleu.

 

Grâce, souplesse et, en même temps, force et détermination caractérisent le jeu de cette splendide violoniste.

 

Après la pause nous retrouvons les cordes et un piano pour Threnody for Toki, op.12 de Takashi Yoshimatsu, une œuvre qui représente l’Ibis huppé japonais menacé de disparition, l’œuvre est particulièrement figurative, les sons évoquent directement l’oiseau, son claquement de bec, ses cris… pensez-vous que si l’orchestre répétait au milieu de champs on verrait des oiseaux se poser, attirés par les cris de leurs congénères ?

 

Les contrebasses sont particulièrement convaincantes, je n’ai jamais entendu d’ibis japonais… par contre la cigogne craquète et les contrebassistes de Brussels Philharmonic ne craignent pas son imitation. Saisissant, amusant… merci aux musiciens pour cette belle découverte.

 

Après Ein Heldenleben, œuvre programmée le 12 octobre, Brussels Philharmonic nous offre une autre œuvre de Richard Strauss :  Tod und Verklärung. Cette musique est plus universelle dans son expression de la mort.

 

Composée en 1888-1889, alors que le compositeur était gravement malade, la pièce évoque la confrontation avec la mort et la remémoration des souvenirs passés jusqu’à la libération ultime. Les vers d' Alexander Ritter ont été ajoutés à la partition après sa composition.

 

Le compositeur semble avoir traduit ses sensations, ses émotions et l’œuvre se révèle particulièrement apte à transmettre ces sentiments à l’auditeur… l’interprétation du Brussels Philharmonic magnifie encore cet aspect… je n’étais sans doute pas la seule à me blottir profondément dans mon fauteuil à Flagey à l’heure où ces notes résonnaient.

 

 

Un petit clin d’œil : Lors des applaudissements, les mimes du chef pour indiquer quels pupitres devaient saluer m’ont particulièrement fait sourire… dynamisme, humour et compétence s’unissent pour notre plus grand plaisir.

 

Orchestre, chef et soliste se rejoignent pour transmettre au public une lecture exigeante des œuvres proposées, le programme est intelligemment construit, nous avons savouré ces paradis perdus et dans ma tête résonnent encore leurs mélodies.

 

 

Merci et bravo !  

Écrire commentaire

Commentaires: 2
  • #1

    Johan (vendredi, 15 novembre 2019 08:30)

    Belle critique inspirée!
    J'entends déjà les oiseaux ...

  • #2

    Anne-Françoise (vendredi, 15 novembre 2019 08:42)

    Le chant de l'alouette ?